Par Catherine Lacaze-Paule.
Sans cesse, l’argument du retard de la France sur les prises en charge de l’autisme fustige les professionnels. Cet argument frappe comme une évidence sans base. Les professionnels sont suspectés d’être têtus et obtus, et ils refuseraient de s’ouvrir à des nouveautés, à se remettre en question. Tous les autres pays, notamment les anglo-saxons, auraient beaucoup d’avance et bénéficieraient de programmes avancés. Pourtant, un article paru dans le journal canadien Le Devoir, écrit par le père d’un enfant autiste, semble refléter une tout autre vision : « La dernière chose dont les familles aux prises avec l’autisme ont besoin, c’est bien de plus de bureaucratie », tranche Andrew Kavchak. (à lire ici.)
Ce père décrit une longue liste d’attente pour bénéficier de programmes de thérapie par Intervention comportementale intensive (ICI), fondée sur les principes de l’Analyse comportementale appliquée (ACA). Faute de pouvoir bénéficier du programme de remboursement, le père dit avoir dépensé 40 000 $ canadiens la première année, suite au diagnostic, avant d’obtenir une prise en charge remboursée par l’État.
Il a ensuite découvert qu’il ne pourra inscrire son fils âgé de dix ans dans un internat avant qu’il ne fête ses dix-huit ans et alors l’attente sera en moyenne de dix ans. Enfin, un projet de Partenariat canadien pour l’autisme (PCA), accompagné d’une demande de soutien totalisant 19 millions de dollars sur cinq ans, est sorti en novembre. Je cite la description du dispositif : « Le PCA offre une vue d’ensemble de la structure proposée (conseil d’administration, directeur national, onze employés, conseil consultatif), et décrit une mission (résoudre les enjeux relatifs à l’autisme à l’aide d’une approche axée sur le partage du leadership) et un processus (consultations, détermination des enjeux, établissement d’un programme, résolution des problèmes, mobilisation, évaluation, mesure, surveillance) – mais ça s’arrête là. En d’autres termes, le PCA prévoit la création d’une autre bureaucratie. »
Conclusion : au Canada, la situation des parents et de leurs enfants n’est pas plus simple qu’en France. Le développement des thérapies par « intervention comportementale intensive » représente une enveloppe budgétaire très intensive et une dépense ruineuse pour les parents, nombreux sont ceux qui ne peuvent pas payer.
Le manque de place dans les deux pays ne les rapproche pas pour le meilleur alors que ce qui apparaît comme un « retard », la psychanalyse dans la prise en charge des enfants et adultes avec autisme, n’est pourtant pas aussi coûteuse, et n’est certainement pas bureaucratique. Au contraire, elle reste tout à la fois un éclairage précieux et précis et une pratique pragmatique qui ouvrent à des développements et des avancées dans l’abord de l’autisme.
C. L.-P.