L’histoire banale d’un père et d’une fille

Par Marine David, intervenante à L’Antenne 110 (Genval) et à La Soucoupe (Bruxelles).

C’est le titre du livre qui retient mon attention et comme j’ai un peu de temps devant moi, je me lance. C’est parti pour la lecture intégrale et ininterrompue du témoignage poignant du papa d’une fille autiste : Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres, de Maxime Gillio (1).

Gabrielle a aujourd’hui 16 ans et a été diagnostiquée dès son plus jeune âge et de manière progressive : de petits signes à la batterie de tests, elle est déclarée autiste, Asperger.
Le papa, Maxime, parle en son nom de la relation avec sa fille. Ancien enseignant et auteur, il compile les anecdotes publiées au départ sous forme de statuts sur son compte Facebook.

Le ton est assez noir, mais quelques-unes des histoires qu’il choisit de sortir de l’intimité sont amusantes et pour le moins parlantes. Il s’agit principalement du parcours scolaire de Gabrielle, enseignant oblige? La jeune fille a en effet connu plusieurs établissements et son parcours est jalonné à cette occasion de toutes sortes d’abréviations: AVS, TED, ULIS (2) et autres. L’inclusion scolaire est une idée maîtresse du monde politique français actuel et Maxime et sa fille n’y échappent pas. Nous accompagnons la jeune et ses parents au plus près de ce qui a fait leurs succès et leurs échecs. Les originalités de Gabrielle sont détaillées, tout comme les stratégies déployées par la famille et les professionnels pour avancer tant bien que mal. Parce que oui, ils sont déterminés à AVANCER!

Le livre est avant tout humain et pose des questions existentielles quant au quotidien avec un enfant autiste. Il est truffé de petites discussions père-fille adorables qui interpellent.

Le papa nous raconte par exemple comment il a accompagné sa fille en voyage scolaire afin de lui permettre d’y participer et comment ensuite il a dû dépasser le constat désarmant de la solitude de sa fille pour lui donner quelques modes d’emploi sur les amitiés. Un peu plus loin, nous découvrons un chapitre annoncé par le titre du livre : la passion de Gabrielle pour les narines. Je vous laisse imaginer les incidents diplomatiques que cela a réservé à sa famille : lors d’une virée de shopping, Gabrielle rencontre les narines d’une personne naine et hop elle y introduit son doigt. Dans le chapitre consacré à cet épisode, Maxime Gillio explique en détail comment il passe d’une gêne immense à une complicité inattendue avec ses filles et sa sœur.

Je vous recommande tout particulièrement la lettre du père à la FIFA (3) : d’un intérêt soudain tout autant qu’incongru pour une fille de son âge, Gabrielle se passionne pour la coupe du monde de foot 2014 au Brésil et son intérêt fait lien entre elle et son père. « Si la France gagne, est-ce qu’on va être contents ? Est-ce que quand ça sera fini je pourrai garder le calendrier avec les résultats tout le temps ? » (4).

(1) Gillio, Maxime, Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres, éditions Pygmalion, Paris, 2017. (2) Auxiliaire de Vie Scolaire, Trouble Envahissant du Développement, Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire. (3) Fédération Internationale de Football Association. (4) Gillio, Maxime, Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres, op. cit., p. 99.

N.D.A. : À noter qu’une partie des bénéfices des ventes est reversée à l’association Autilink (https://www.facebook.com/Autilink-459677047514229/), qui œuvre pour l’insertion professionnelle des autistes.