Par Jean Pierre Rouillon.
Le 30 janvier 2017, à Paris, Ron Suskind présentait le livre Une vie animée, consacré au destin de son fils autiste Owen. C’est grâce à Myriam Chérel Perrin que nous avons pu rencontrer Owen et ses parents en 2015, lors du colloque sur l’ « Affinity thérapy » à Rennes. Nous avons pu alors nous rendre compte des liens profonds qui existaient entre la démarche de Ron et Cornelia Suskind et la pratique analytique d’orientation lacanienne, qui se fonde sur le respect de la singularité et des trouvailles du sujet. Cette soirée a permis de mesurer l’engagement profond des parents d’Owen pour la position de leur fils durant des années et la joie qu’ils pouvaient retirer devant les trouvailles d’Owen.
Mais, ce qui apparaissait surtout, au-delà du monde merveilleux de Walt Disney que s’est construit Owen, c’est la réalité du monde merveilleux d’ABA tel qu’on nous le promet en France. Depuis tant d’années, on nous parle du retard français et de la réussite des méthodes comportementalistes. Il suffirait de former tous les professionnels et tous les parents à cette méthode infaillible pour que les problèmes disparaissent et pour que l’enfant et l’adulte autiste soient enfin inclus dans la société.
Eh bien, l’histoire que nous a racontée Ron Suskind, l’histoire qu’il déploie dans son livre ne ressemble guère à ce conte de fées. On y retrouve les mêmes difficultés, les mêmes exclusions, les mêmes douleurs que celles qui sont présentes sur notre vieux continent. Owen, considéré comme autiste avec régression est exclu de certaines écoles, on considère comme inappropriée sa passion pour les films de Walt Disney. Cela est d’autant plus surprenant que les Suskind sont pourtant bien implantés dans la société américaine. (1)
Certainement que la croyance des parents d’Owen à ces intérêts et à ces ilots de compétence résonne avec le mode de vie américain dans ce qu’il a de plus digne et de plus élevé. Mais il résonne tout autant avec une éthique qui consent à respecter la position subjective et la possibilité de création de chaque parlêtre face à l’abrasement de la normalité. Avec le témoignage précieux de Ron Suskind, sur « la vie animée d’Owen », avec le dévouement de Cornelia, et grâce au dialogue qu’ils ont noué avec Myriam Cherel, nous savons désormais que notre combat ne vise pas à glorifier le passé, mais plutôt à ne pas insulter l’avenir.
C’est en faisant nôtre cette lutte des parents pour respecter la singularité de leur enfant que nous sommes au plus près de notre éthique et de la joie qu’elle peut nous apporter. Il ne s’agit donc pas tant de nous émerveiller sur les lustres de notre clinique passée, que de trouver les voies pour la clinique de demain. Prenons conscience du fait, qu’aujourd’hui, on veut nous interdire cette clinique, et que c’est cela qui se passe dans les faits.
Le « nous », c’est un pari concernant ceux qui veulent poursuivre à s’enseigner de ces sujets. Pour Ron Suskind, il a su montrer à Paris qu’il soutenait pleinement la position de Myriam Cherel.
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